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mangeait que de l’oseille cuite, ou des racines, elle faisait des
pénitences incroyables.
Elle ne se lassait jamais de prier pour une infinité de personnes,
jamais elle ne voulait ouïr parler de défauts d’autrui, et n’ayant
aucune tendresse pour soi-même, elle en était pleine pour le
prochain.
Quelque mal qu’elle eût, jamais elle ne se dispensait de la
régularité, s’il ne lui était ordonné expressément, et si l’on n’eût
veillé sur elle, on n’eût jamais su qu’elle eût aucun mal. Jamais
elle ne prenait aucun divertissement, elle ne dormait point, mais
jour et nuit elle adorait sans relâche le Saint Enfant Jésus.
Quelque douleur qu’elle eût, on n’entendait jamais la moindre
plainte de sa bouche, et elle faisait toujours ses maux petits.
Elle ignorait que l’on pût faire une feinte, car si on lui eût dit, que
du bois était du pain elle n’eût pas examiné, et si en se reprenant
on lui eût dit le contraire, je l’ai vue en ces occasions
extrêmement étonnée.
Je ne l’ai jamais ouï parler d’elle-même, et elle tenait pour
maxime qu’il valait mieux ne rien dire de soi, que d’en parler
même en nous humiliant.
Elle se portait à la vertu avec une admirable efficacité.
Je lui ai vu faire quelque chose pour le service du Saint Enfant
Jésus, où elle prenait des charbons de feu, comme si c’eût été du
bois, je l’en voulus empêcher, disant, qu’elle se brulerait, mais