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CHAPITRE XI
Continuation du témoignage du même père, où
est contenu un entretien d’un autre père avec la
sœur.
Le père de bonne foi, supérieur d’une maison de l’oratoire de
Troie, fut envoyé en bourgogne pour y faire les visites ; comme il
avait ouï parler de la sœur, la première chose qu’il me dit en
arrivant à Beaune, fut, qu’il désirait fort de la voir. La vertu, la
doctrine, la qualité et les mérites de ce père m’eussent obligé à
l’en prier quand il n’en eût pas eu la pensée, tant ce m’était une
joie que plusieurs personnes de sa sorte fussent témoins de cette
merveille que Dieu tenait cachée dans un monastère. Il la vit
donc, et lui parla une heure entière en ma présence. Voici une
partie des demandes qu’il lui fit après les civilités ordinaires,
auxquelles sœur Marguerite ne manquait jamais de satisfaire. Il
me confessa qu’il avait été surpris d’abord de la beauté céleste de
son visage, où la sainteté se lisait en telle sorte, que sa présence
lui en fit concevoir toute autre chose qu’il ne s’était pu imaginer.
Il lui demanda pourquoi elle parlait toujours du S. Enfant Jésus ?
Elle répondit,
Il m’applique à ce mystère.
Pourquoi appelez-vous
les saints innocents vos frères ?
Le Saint Enfant Jésus,
dit-elle,
me les a donnés pour tels.
Etes-vous bien aise de venir au
parloir ? Est-il vrai que vous ne dormez point ?
Oui mon père.