Page 158 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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Toutefois, parmi tant de richesses et de bonheur, elle vit que ce
Cœur aimable avait été noyé dans des abîmes profonds de
douleurs et d’amertumes, qu’Il avait été abattu et languissant de
tristesse à cause des péchés des hommes, dont Il avait été obligé
de digérer le fiel et le venin et qu’à moins d’être soutenu par le
Verbe, Il eut succombé sous la pesanteur de nos crimes.

   Mais nonobstant les palpitations et les syncopes où l’horreur de
nos péchés L’avaient réduit tous les jours de sa Vie, avec tous les
combats qu’Il avait soutenus contre les douleurs de la mort, elle
connut en ce Cœur un si admirable transport d’Amour pour ceux
qui Lui avaient causé tant de maux que son courage surpassait de
beaucoup la crainte. C’était la force et la générosité de cet Amour,
qui avait repoussé les esprits et les humeurs qui s’étaient retirés
vers le centre lorsqu’Il lutta contre l’appréhension de la mort, et qui
Lui a causé la sueur générale de sang par tout le corps. Elle vit ce
Cœur admirable comme le Palais sacré où étaient nées et où
avaient été nourries toutes les Affections de Jésus-Christ, tous ses
désirs, toutes ses dévotions, toutes ses joies, toutes ses
tristesses. Mais parmi tous ces trésors inépuisables de vertu et de
sainteté, ce fut principalement de l’Amour de la Pureté de cœur et
de l’Innocence dont elle fut rendue participante.

   La possession que Dieu prenait d’elle tous les jours de plus en
plus avait tellement consumé ses facultés animales qu’elle ne
prenait presque pas de nourriture. Mais en revanche elle trouvait
dans ce Cœur Sacré de Jésus-Christ un supplément surnaturel
qui la soutenait sans manger et qui plus noblement que n’eut fait

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