Page 154 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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Parmi tant de lumières et de connaissance des Saints et des
Anges que Dieu communiquait à Sœur Marguerite, Il lui donnait
encore une grâce que nous devons priser incomparablement plus
que toutes les Révélations qu’elle a jamais eues, ce fut un désir
de suivre en toutes choses l’ordre de sa Communauté, et une
affection de rendre plutôt quelque service à ses Sœurs que d’être
élevée dans ces ravissements qui la privaient des exercices de sa
Règle.

   Elle témoigna par cette disposition qu’elle avait un espoir
véritablement religieux et qu’elle ne s’emportait pas à vouloir bâtir
son tabernacle sur le Thabor, mais que son inclination était plutôt
de porter, comme Simon de Cyrène, la Croix du Fils de Dieu sur
le Calvaire. Elle préféra l’obscurité de la Foi à la lumière d’un
Paradis avancé, et son âme fut si humble et si sobre dans les
Divines Caresses, qu’elle buvait sans s’enivrer du torrent des
voluptés de Jésus-Christ. C’était vivre dans un détachement de la
Béatitude, bien qu’il soit impossible de ne pas l’aimer. Et c’était
posséder les richesses du Ciel avec une vraie pauvreté d’esprit.
Plus il y a sujet de se défier des âmes qui sont avides des grâces
extraordinaires et qui établissent leur bonheur dans les
consolations sensibles, plus nous devons admirer celle-ci, qui
comme le Fils de Dieu, préférait la confusion et la pénitence à la
gloire et à la félicité, et qui non seulement méprisait la grandeur
du monde, ainsi qu’un Moïse, mais désirait plutôt le mépris et
l’humiliation de Jésus-Christ avec ses enfants en la terre, que la
participation de ses honneurs et de sa joie parmi les Anges et
parmi les Saints du Ciel. C’est ce point de la vie de notre Sœur qui

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