Page 83 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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des Sœurs. Elle les regardait toutes comme Epouses de Jésus-
Christ et ne s’appliquait à elles qu’en cette seule considération.

   L’esprit d’oraison dont elle était animée dès son enfance lui
faisait aimer extrêmement la solitude. De sorte qu’elle se tenait
dans sa cellule le plus qu’elle pouvait, quoique ce fut là que les
malins esprits lui fissent une cruelle guerre. Souvent plusieurs
démons se joignirent ensemble pour l’en faire sortir par force. Ils
la tiraient par ses habits, ils imprimaient dans son imagination une
extrême horreur de la solitude, avec un fort mouvement de s’en
aller divertir. Ils ajoutaient la crainte à l’image du divertissement et
au dégoût du silence, se présentant à elle comme des loups
affamés et des lions rugissants prêts de la mettre en pièces.

   Mais alors cette Petite, résistant par la prière, se jetait en terre,
et s’adressant à Jésus-Christ et à la Sainte Vierge, implorait le
secours qu’ils lui avaient promis. Quelquefois elle se levait toute
animée de ferveur et, poussant ses ennemis du pied, leur disait
avec une hardiesse forte et généreuse : Allez misérables, je ne
sortirai point. Enfin, Jésus-Christ, jetant ses rayons du Tabernacle
du très auguste Sacrement, répandait sur elle une divine clarté qui
la délivrait de peine et qui mettait les démons en fuite.

   Une fois, ils virent quatre à elle en forme de bêtes prêtes à la
dévorer, ils la renversèrent par terre, l’un la prit à la gorge, les
autres hurlèrent horriblement autour d’elle, en sorte que ce jour-
là, elle se crut perdue sans ressource. Dans cette extrémité, elle
invoqua de toute sa force la très Sainte Vierge par ces paroles :
Faites-moi paraître que Vous êtes Mère. Et soudain, cette Reine

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