Page 59 - Vie de la mère Élisabeth de la Trinité de Quatrebarbes par M. l'abbé Colet,.... 1861.
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   Ce qui prouve que ces actes provenaient en elle d'un
véritable amour de la croix, c'est l'esprit d'abnégation qui
les accompagnait; car personne n'a poussé plus loin que
la Mère Elisabeth l'attention à se priver des satisfactions
les plus légitimes en apparence. Pendant bien des années
elle s'est privée d'aller au jardin ; ou si quelque devoir
l'y appelait, elle y était aussi recueillie qu'au choeur, évi-
tant de récréer sa vue en l'arrêtant sur les fleurs ou sur la

verdure qui se trouvaient sur son passage. Jamais, en au-
cune circonstance, elle ne se permettait une parole ou un
regard inutiles. Lorsqu'elle avait à répondre à une ques-
tion ou à une interpellation, elle le faisait en peu de mots;
et si, pendant le silence, on avait à l'entretenir de choses
nécessaires, elle donnait sa décision par écrit. En dehors
desdevoirs de charité, pour lesquels elle était toujours au
service de tout le monde, elle évitait scrupuleusement
tout rapport avec les créatures, ne cherchant que la soli-
tude et le silence. Les religieuses ont déposé que jamais
elles ne lui avaient entendu articuler une parole sans
qu'il y eût nécessité ou utilité, et que jamais elle ne
prêta volontairement l'oreille aux nouvelles du dehors ou
aux récits divertissants. Etant hors de charge, il lui arri-
vait quelquefois de se trouver avec la Mère Prieure lors-
qu'une soeur sortant du parloir lui racontait ce qu'elle y
avait appris. La Mère Elisabeth se retirait alors immédia-
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