Page 68 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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Et que de peur que les riches naturels qu’elle sanctifie ne
prétendissent relever sa puissance par leur propre vertu, Il se plait
à la faire éclater dans le néant ? Si bien que partout Il nous oblige
à Lui déférer la gloire, soit qu’Il abatte le courage d’un persécuteur,
ou qu’Il ennoblisse un bel esprit de la science de la foi, ou qu’Il
résiste aux Démons par un enfant. Il n’a pas permis à ces
monstres de la tourmenter, si ce n’est par la tristesse, par le
dégoût, par la peur, et par le travail du corps : pour nous faire
remarquer que la grâce du Baptême, qui n’a point reçu de
blessures mortelles, sert d’un rempart puissant à l’esprit, où
proprement elle réside comme au faîte de l’âme, et que l’ennemi
ne peut guère entrer dans ce fort qu’après avoir gagné les dehors.
Dieu nous fait voir par-là que les plus grandes forces de Satan qui,
comme dit Job, consistent dans l’impureté, sont inutiles lorsque la
concupiscence n’est pas encore morte, ou pour mieux dire,
lorsque l’orgueil ne leur a point ouvert le passage, ou (s’il faut
entrer plus avant dans le secret de la grâce) le Fils de Dieu nous
témoigne qu’Il n’a pas voulu qu’une âme qu’Il préparait à une
grande participation de son Enfance Spirituelle, vit jamais aucune
image d’un vice, duquel cette grâce est la plus éloignée et que l’on
peut dire le plus opposé à l’innocence.

   Il nous fait connaître que les mouvements de rage ou de
blasphème contre Dieu, qui sont les grandes machines du
tentateur, ne s’essayant que sur des sens corrompus, notre Enfant
pure comme un Ange, était très éloignée de les concevoir. Et que
le bruit, les figures affreuses, les blessures du corps, la tristesse,
l’obscurité sont de faibles armes contre un esprit qui n’en tient

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