Page 103 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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6 juin 1631, elle reçut cette faveur avec une dévotion et avec des
grâces toutes extraordinaires.

   Deux jours après, le lendemain de la Pentecôte, le chirurgien
étant venu pour faire l’opération, il n’est pas croyable avec quelle
paix d’esprit elle s’y prépara, ni avec quelle confiance elle souffrit
l’application du feu.

   Jamais on ne la vit pâlir et le bouton ardent lui ayant été mis sur
la tête par deux fois, elle n’ouvrit pas la bouche pour dire la
moindre parole. Seulement lorsqu’on l’appliqua pour la troisième
fois, elle joignit les mains et dit fort doucement : « Mon Dieu ! »,
mais sans s’écrier ni témoigner aucune altération ni faiblesse. Son
visage n’avait point encore paru si beau qu’il parut alors. On ne
pouvait se lasser de la regarder et les Sœurs qui la virent dans cet
état disent qu’elles ne s’en souviennent jamais sans ressentir
quelque renouvellement de grâce. Les médecins et les chirurgiens
furent ravis de voir tant de force et tant d’effets de Dieu en une fille
de douze ans.

   Ce fut alors que les démons lui parurent comme triomphants de
la mort, laquelle ils s’efforcèrent d’avancer par mille amertumes
dont ils lui remplirent les sens. Et de fait, ce remède n’ayant servi
qu’à l’affaiblir davantage, les convulsions redoublant d’heure en
heure, il y eut grand sujet de craindre qu’elle n’expirât tout à coup.
Néanmoins son esprit jouissait d’une entière liberté et elle était
tout ensemble un spectacle de vie et de mort, de bonheur et de
tourments. On ne pouvait considérer son corps dans le travail sans

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