Page 104 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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jeter des larmes de douleur, ni voir la paix et la majesté de son
visage sans être puissamment touché de Dieu.
Enfin, comme il semblait à tout moment qu’elle allait rendre
l’esprit, les médecins voyant que sa tête ne se déchargeait point
par cette voie, crûrent que le mal pouvait venir de quelque humeur
qui croupissait entre les deux tables du crâne, ou entre le crâne et
les membranes du cerveau.
C’est pourquoi ils jugèrent sagement, selon les lois de leur art,
qu’il fallait la trépaner afin de donner de l’air à la corruption, s’il y
en avait d’enfermée dans ces parties, qui est en ce cas le seul
moyen de soulager la nature.
Les Religieuses, la voyant mourante, y consentirent par
nécessité. On fit entrer les chirurgiens avec leurs ferrements et
avec tout leur appareil effroyable. On la rasa, on lui fit des
incisions, on découvrit l’os, le détachant par force pour faire place
à l’opération, qui font toutes de très cruelles douleurs. Cependant,
cette petite les souffrit avec tant de paix et avec un visage si gai et
si content qu’il semblait qu’on ne fit que la couronner de roses.
L’os étant percé, tant s’en faut qu’il sortît aucune corruption ni
aucune vapeur maligne. Au contraire, l’on voyait la dure mère
parfaitement saine se mouvoir également de son mouvement
naturel.
Alors les médecins furent fort étonnés que, dans la tourmente
générale qui paraissait dans tous les nerfs, il y eu une telle bonace
et tranquillité dans la source. L’un d’entre eux, admirant la
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