Page 108 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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presque du manger. Comme elle eut passé deux mois dans cet
accablement de travail, enfin un jour que les médecins étaient
absents ou empêchés, et que les Sœurs s’affligeaient
extrêmement de la voir sans secours dans un si pitoyable état, il
vint dans l’esprit de la Supérieure de lui commander de guérir.
Cette sage et vertueuse Fille résista durant trois ou quatre jours
à cette pensée, se défiant, comme c’était un esprit humble et
prudent, d’un mouvement de cette nature. Toutefois un soir, sur
les neuf heures, comme la Petite était beaucoup plus malade que
de coutume et qu’il n’y avait point d’apparence qu’elle dût passer
la nuit, la voyant dans l’agonie, la même pensée lui revint avec
plus de force qu’auparavant, sur quoi, s’étant recommandée à
Dieu avec grand soin, elle crut qu’elle pourrait appliquer sur la
malade une partie du camail du Cardinal de Bérulle, qui était
conservée dans le Monastère. Elle s’en alla donc enfin la chercher
et, l’ayant mise sur la malade en disant ces paroles qui lui vinrent
dans l’esprit : « Ma sœur, soyez guérie par obéissance à notre très
honoré Père ». Cette Petite fut délivrée tout à l’instant, et alors elle
vit tous les démons qui se précipitaient aux Enfers, ne pouvant
souffrir la vertu d’obéissance.
Il y avait deux mois entiers qu’elle n’avait pas pris de repos,
mais elle dormit fort bien la nuit suivante, avec autant de paix et
de douceur que les personnes les plus saines. Le lendemain,
comme elle rentrait à l’Infirmerie après la Sainte Communion, une
grande troupe de démons lui apparut en forme de bêtes qui
recommencèrent à la tourmenter plus que jamais. En un moment,
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