Page 109 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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les ongles lui entrèrent dans la chair par une effroyable convulsion
des muscles : l’épaule gauche lui trembla longtemps avec tant
d’effort qu’on ne pouvait regarder cette pauvre Petite sans frayeur.

   On remarqua le battement de son cœur à travers ses habits, on
lui vit aussitôt les dents serrées, les yeux lui roulèrent dans la tête
et le cerveau souffrit de si cruelles agitations que celles qui la
virent furent touchées d’une très vive douleur. Lorsqu’elle se sentit
en cet état, elle se recommanda instamment aux prières des
Sœurs et après avoir demandé un reliquaire et un crucifix, elle
perdit la parole.

   On envoya promptement chez tous les médecins pour lui
procurer quelque secours, mais comme il ne s’en pût trouver
aucun car il y avait alors beaucoup de malades à la campagne, la
Prieure, qui avait longtemps retenu la pensée qui lui était venue
de réitérer son remède, se rendit enfin au mouvement qu’elle en
avait et, appliquant le même camail avec le même
commandement que la première fois, elle vit soudain un
semblable effet. La malade ouvrit la bouche, étendit les mains,
marcha facilement et se sentit aussi forte que si elle n’avait jamais
eu aucun mal. Toutefois, à midi, le même accès lui redoubla
encore et, parce qu’il n’y avait pas d’apparence qu’elle dut résister,
on fit entrer le Confesseur afin de lui donner l’absolution pour la
dernière fois.

   Il ne fut pas possible d’avoir de médecin ce jour-là, si bien que
la malade tirant à la fin avec des violences qui faisaient fondre les
Sœurs en larmes, la Mère apporta encore la partie du camail et

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