Page 111 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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multitude et en toutes formes, et vinrent par bandes lui livrer
chacun son combat.
Les uns se présentaient en figures d’hommes morts, les autres
en figure de petits nains, puis ils paraissaient comme des
monstres composés de plusieurs natures. Ensuite venaient les
bêtes les plus cruelles, lions, léopards tigres, chiens enragés,
oiseaux, dragons, en troupes différentes, et le nombre en fut si
grand que les Religieuses, les lui entendant nommer à mesure
que chaque légion se présentait, s’étonnaient qu’une enfant
connût tant d’espèces extraordinaires et que, parmi tant d’images
affreuses, et de si grands maux qu’elle souffrait, elle conservât une
telle force et une si grande tranquillité d’esprit. Après avoir éprouvé
les efforts de tous ses ennemis qui tantôt la mordaient, tantôt
l’accablaient de leur pesanteur, tantôt l’élevaient en l’air puis la
laissaient tomber comme dans des abymes, dont ils lui
découvraient le fond pour l’épouvanter par cette vue. Enfin il parut
à son esprit un puits d’une profondeur démesurée auprès duquel
était le Fils de Dieu Enfant, accompagné de Saint Etienne et de
Sainte Thècle, qui plongeaient ces monstres dedans. Alors elle
devint belle comme un Ange et on la vit battre des mains avec une
joie de triomphe, comme si elle eût contribué à renfermer ces
monstres dans ce puits.
Plusieurs Filles, considérant cette action, conçurent une grande
espérance que Dieu lui donnerait la santé et firent instance à la
Supérieure afin qu’elle lui commandât de guérir pour toujours. Elle
qui ne l’espérait pas moins que ses Sœurs, voyant ce désir
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