Page 106 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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bien qu’elle ne connaîtrait rien en la terre de plus désirable que
d’être crucifiée avec Jésus-Christ. Elle ne se mettait pas
seulement en sa place, afin de porter dans son esprit les maux
qu’elle ressentait, mais encore en celle des pécheurs dont les
misères la touchaient plus sensiblement que ses propres maux.

   Son intention était toujours offerte pour quelques-uns desquels
Dieu lui faisait connaître l’état, et leur dureté l’occupait en telle
sorte pendant ses tourments que la charité les lui faisait estimer
très légers.

   L’amour de Jésus-Christ souffrant et le zèle du salut des âmes
la transportaient hors d’elle-même et la rendaient insensibles à
tous ses intérêts particuliers. C’est pourquoi on ne la voyait jamais
appliquée à son mal, elle ne prenait même pas plaisir qu’on lui en
parlât, et ce qui est rare dans les plus parfaits, elle était si sainte
et si détachée de ses propres douleurs que ni les fers, ni les feux
ardents ne la pouvaient détourner de la pensée de Dieu. De sorte
que c’était une chose admirable de voir sa force, sa persévérance,
sa sainteté et la joie qu’elle avait de souffrir, qui étaient des
communications des plus sublimes vertus du Fils de Dieu mourant
sur la Croix.

   Encore que ce chapitre soit rempli de saintes instructions et que
partout l’esprit y paraisse autant que l’extérieur, néanmoins il ne
faut pas omettre une remarque importante dont il nous fournit la
matière. Nous y voyons des médecins très capables qui suivent
exactement les règles de leur profession, et toutefois ils ordonnent
des remèdes extrêmes qui ne servent qu’à découvrir qu’il y a des

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