Page 92 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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CHAPITRE V

     Autres artifices dont l’esprit malin s’est servi contre Sœur
                                    Marguerite.

   Si le diable était capable de contenir son orgueil et son envie, il
eut mis les armes bas après avoir été vaincu tant de fois par une
fille de douze ans. Mais sa rage ne pouvant être domptée, il ne
tarda guère à revenir au combat avec de nouvelles machines.

   Il ajouta à l’assoupissement que nous avons dit qu’il avait causé
à notre petite une telle pesanteur dans tous les membres que
lorsqu’elle était debout, elle ne se pouvait soutenir sur ses pieds,
et étant couchée sur son lit, elle ne remuait ni bras ni jambes, ni
même tant soit peu la tête. Ce poids excessif était plus incommode
que l’assoupissement précédent, car non seulement il lui rendait
tout le corps perclus, mais lorsqu’on voulait la tourner tant soit peu,
elle se trouvait pesante comme une masse de plomb. Ajoutez à
cela qu’elle ne prenait aucune nourriture qu’avec une extrême
peine, si bien que les médecins l’ayant vue en cet état durant sept
ou huit jours, sans que la nature fut aucunement soulagée,
jugèrent que son mal était une espèce d’apoplexie imparfaite qui
dégénèrerait en paralysie. Les remèdes ne firent que l’affaiblir par
leur violence et lui causer des maladies véritables au lieu d’en
guérir une apparente.

   Des convulsions générales par tout le corps succédèrent à cet
étourdissement et après qu’elle eut souffert une grande agitation

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