Page 24 - Vie de sœur Marguerite du Saint Sacrement, par le Père Amelotte
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Pour dissiper le premier nuage, il nous faut pénétrer dans le
sanctuaire, et jusque dans les secrets de l’Epoux Céleste. Ce
Verbe Divin se rend à la vérité amoureux des âmes, et Il prend ses
chastes délices avec elles, mais ce n’est pas avec des âmes
vulgaires et obscures, c’est avec des âmes illustres et toutes
extraordinaires.

   La qualité d’Epouse du Verbe, disent les saints Docteurs,
suppose des avantages proportionnés à un tel Epoux. Elle ne
s’acquiert que par les vertus les plus sensibles, et par les croix les
plus rigoureuses. Avant qu’une âme parvienne à ce rang, il faut
qu’elle soit morte à toute créature, et à soi-même, que les plaisirs,
les honneurs, l’amitié, le sang, son corps, son esprit, ses pensées,
son jugement, sa volonté, ses desseins, ses grâces, ses
exercices, les actes même de vertu, ne la touchent point, mais la
seule Volonté de Dieu.

   Il faut qu’elle discerne la voix du serpent d’avec celle de l’Ange
du Ciel, et que fermant toujours l’oreille à l’un, elle l’ouvre sans
cesse à l’autre. Que ses délices soient dans la Croix, et qu’étant
persécutée par la calomnie, par les douleurs, par les hommes, par
les démons, par une rigueur de Dieu même, qui tantôt se cache,
tantôt s’applique comme Juste et comme Saint, elle ne s’inquiète
jamais ni ne diminue sa confiance.

   Qu’elle soit plus à son prochain qu’à soi-même, que négligeant
ses propres intérêts, elle soit très sensible à ceux de ses frères, et
que par-dessus toutes ces perfections, elle ait un amour enflammé
et brûlant du désir de son Epoux.

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