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(Extrait du livre
Vie de la Mère Elisabeth de la Trinité, par l’Abbé Collet) |
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Entretiens de la Mère Élisabeth de la
Trinité avec la Sœur Marguerite du Saint Sacrement, sur le Voyage du Fils de
Dieu en Égypte, sur la Personne de la Sainte Vierge, sur les Pasteurs et les
Rois Mages. La
Sœur Marguerite, étant interrogée par la Mère Élisabeth sur le Voyage du Fils de Dieu en Égypte, dit que la
Sainte Vierge n'eut connaissance de la nécessité d'accomplir ce Voyage que
par le témoignage de Saint Joseph, non qu'elle ignorât le sens de la
prédiction du prophète Osée : « J'ai appelé mon fils de l'Égypte ». Mais
Elle n'apprit le temps où cet Exil devait s'accomplir que par la bouche de
Saint Joseph : ce que la Divine Providence avait permis pour augmenter
le mérite de son obéissance, de sa résignation et de son sacrifice. Elle
ajouta que le Saint Enfant Jésus fut porté en Égypte peu de jours après la Fête de la Purification de la
Sainte Vierge, et que le Saint Esprit les conduisit durant tout le Voyage,
comme Il les avait conduits dans l'Étable
de Bethléem ; enfin, qu'ils demeurèrent en cette terre l'espace de sept
ans. « Ces
sept premières années, dit-elle, ont été si dignes de Dieu et ont rendu un Honneur si particulier au
Père Éternel, qu'il nous est
impossible de le comprendre. Les Anges adorent et révèrent cet Honneur, et
nous devons nous unir à eux pour adorer et aimer cet État où le Divin Enfant
a été durant ces sept premières années qu'Il a passées en la terre
d'Égypte ». Au
moment où l'Ange avertit Saint Joseph d'emporter l'Enfant Jésus en Égypte,
toute la crainte qu'il avait d'Hérode, dont la tyrannie lui était fort
connue, lui fut ôtée, et il reçut une assurance en son âme que le Divin
Enfant serait en sûreté sur cette terre étrangère. Il marcha donc conduit par
le Saint-Esprit et accompagné des Saints Anges. La
Sainte Vierge portait son Fils entre ses bras, et Le regardant quelquefois
avec un Amour qui ne se peut expliquer, Elle recevait de grandes Lumières sur
la Fuite de ce Dieu Enfant. Elle entrait souvent en de hautes et amoureuses
Communications avec le Père Éternel, qui Lui faisait comprendre les Mystères
de son Fils ; et souvent avec les Anges, qui recevaient par Elle des
Lumières sur l’Enfance de Jésus. La
Sœur dit que durant ce Voyage le Divin Enfant fut extrêmement travaillé du
froid et fatigué du chemin qu'Il en pleurait quelquefois, et regardait sa
Sainte Mère comme attendant d'Elle quelque secours ; que la Sainte
Vierge, qui L’aimait d'un Amour de Mère fort tendre et fort sensible,
souffrait de tout ce qu'Elle Lui voyait souffrir ; et que le mal de ce
Divin Enfant pénétrait de telle sorte l'Âme de Marie et celle de Saint
Joseph, que l’on ne saurait comprendre ce qu’ils endurèrent de tourments
jusqu’au moment de leur arrivée en Égypte ; que le Père Éternel voulut
conduire la Sainte Famille en cette terre comme en un lieu de retraite et de
solitude, afin de s'y glorifier en son Fils et par son Fils, et de parler au
Cœur de la Sainte Vierge et de Saint Joseph. Aussi
fut-ce en ce pays que la Grandeur des Mystères de la Sainte Enfance de Jésus
leur fut clairement découverte. L'Enfant Jésus, dit-elle, approchant de ce
royaume, disposa divinement l'esprit des Égyptiens à Le recevoir, et, bien
qu'Il ne se fit pas connaître, sa Puissance agit
néanmoins sur eux, de telle sorte que la Sainte Vierge et Saint Joseph,
arrivant en Égypte, trouvèrent un accès facile auprès de ces idolâtres. Il y
eut des personnes qui les accommodèrent d'une petite maison et qui leur
donnèrent les choses les plus nécessaires pour leur ménage. Les Égyptiens se
sentirent heureux de posséder la Sainte Famille. Ils La regardaient
quelquefois avec admiration, selon qu'il plaisait à l'Enfant Jésus d'opérer
dans leurs âmes. Ils étaient étonnés de la conversation si Sainte de Saint
Joseph ; et quelquefois le Divin Enfant, leur faisant voir un petit
éclat de sa Divine Beauté et de sa Douceur, agissait sur leurs esprits par
une certaine application de sa Puissance par laquelle Il portait ce peuple à
L'aimer. Néanmoins
Il imprimait en eux un si grand respect à son égard et envers la Sainte
Vierge et Saint Joseph, qu'aucun d'eux ne put jamais prendre la liberté de
traiter avec la Sainte Famille comme avec d'autres personnes. Les Égyptiens
n'approchaient de l'Enfant Jésus qu'avec crainte et révérence. Jamais aucun
d'eux ne L'a baisé ni tenu par la main, ni exercé sur sa Personne aucune
espèce de familiarité tant ils étaient portés au respect envers cet Adorable
Enfant, dont ils admiraient la Beauté et la Perfection, sans toutefois
connaître sa Divinité. Elle
dit que cette humanité des Egyptiens ne leur était pas naturelle, et qu'ils
n'auraient point fait à d'autres personnes étrangères l'accueil que reçut
d'eux la Sainte famille ; que, par un effet de sa Puissance, Dieu les
disposa de telle sorte que Saint Joseph et la Sainte Vierge ne furent point
obligés de mendier leur vie, encore qu'ils fussent très pauvres. Chaque jour
la Divine Providence faisait naître à Saint Joseph l'occasion de gagner par
son travail ce qui était nécessaire pour entretenir sa Sainte famille. Elle
dit que, le temps de la sanctification des Égyptiens n'étant pas venu, ils ne
reçurent pas la grâce justifiante ; que l'Enfant Jésus ne se manifesta
pas à eux, quoiqu'Il agit
puissamment sur leurs esprits pour les tenir en respect et en révérence ;
que ce respect fut de telle nature, qu'ils n'avaient point de parole en la
Présence du Fils de Dieu, de la Sainte Vierge et de Saint Joseph ;
qu'ils portaient gravé dans leurs cœurs un sentiment de la Grandeur Sacrée de
la Sainte famille, qui les engageait secrètement à L'honorer et à
L'aimer ; mais qu'ils ne connaissaient ni le principe ni la nature de ce
sentiment, et qu'il agissait dans l'âme de chaque particulier sans qu'ils
fussent capables d'en parler ni de se le témoigner les uns aux autres. Elle
dit que Dieu l'avait produit en eux en la manière dont Il agit sur Caïphe
lorsqu'il prophétisa qu'il fallait qu'un homme mourût pour le peuple ;
que la Puissance de Dieu avait tenu sa langue et l'avait fait parler sans
qu'il reçût aucun effet de la grâce ni qu'il en devint plus vertueux ;
qu'ainsi Dieu avait excité et touché ce peuple sans qu'il en fût rendu
meilleur, étant demeuré dans son idolâtrie. Elle
dit encore que les Égyptiens furent liés par le respect envers ces Sacrées
Personnes à ce point qu'ils n'osaient les approcher ni les regarder qu'avec
une certaine crainte dont nous ne connaissons aucun exemple. Cependant,
lorsqu'ils étaient dans l'affliction, de quelque nature qu'elle fût, ils ne
voyaient jamais le Divin Enfant, ni la Sainte Vierge, ni Saint Joseph, sans
éprouver une paix inexplicable dans
leurs âmes, laquelle dissipait toutes leurs tristesses et toutes leurs
peines. Elle dit que jamais ces Trois Saintes Personnes
n'avaient eu de communication familière avec ce peuple ; que jamais le Saint
Enfant Jésus ne fit d'actions puériles et ne se trouva jamais parmi les
enfants des Egyptiens, mais qu'Il se tint toujours auprès de la Sainte Vierge
et de Saint Joseph ; que les enfants même de ce pays Le révéraient sans
oser Lui dire un mot ni s'approcher de Lui. Elle dit que l'Enfant Jésus commença à marcher peu
à peu comme les autres enfants ; que ce fut le jour où sa Sainte Mère Le
sevra, qui était celui où l’Église célèbre la Fête de son Incarnation, quinze
mois après sa Naissance, et que par ses premiers pas, Il marcha vers la
Sainte Vierge et vers Saint Joseph. Elle dit un jour ce qui suit : « Le Saint Enfant Jésus a
bien relevé les Vertus durant son Enfance ; car Il a été de telle sorte
dans l'innocence, qu'Il ne s'est jamais abaissé aux puérilités des autres
enfants. » Et, jetant les yeux sur une image où le Fils de
Dieu était représenté se récréant avec Saint Jean-Baptiste : « Mon
petit Roi, Lui dit-elle, votre Innocence n'est pas là bien dépeinte. Vous
portez en Vous la Joie, la Douceur et la Bonté des petits enfants ; mais
vos Mains Divines n'ont pas fait cette action. » Lorsqu'elle voyait des peintures où le Fils de
Dieu était représenté comme travaillant de son métier de charpentier, ou
balayant la maison, ou rendant quelque autre service à la Sainte Vierge ou à
Saint Joseph : « Vous
avez fait ces actions-là, disait-elle, et d’autres semblables, pour nous
donner l’exemple, comme étant le plus humble de tous. » Elle dit que l'Enfant Jésus, la Sainte vierge et
Saint Joseph, sortirent de l'Égypte en silence, comme ils y étaient
venus, et que les Égyptiens, se
voyant privés de ces Saintes et Vénérables Personnes dont la présence leur
avait apporté tant de joie et tant de consolations dans leurs peines, furent remplis d'une
profonde tristesse, et que la
Divine Puissance leur fit sentir la perte qu'ils avaient faite, sans leur
laisser la liberté de témoigner leur douleur, et sans qu'ils connussent davantage la Dignité de cette Sainte famille. Que le Saint Enfant Jésus entrant à Nazareth
apporta une grande Joie à toute la ville ; que les parents de la Sainte
Vierge en firent une réjouissance toute particulière, et que les enfants en
furent tout émus ; mais que cette Joie, différente de la nôtre, fut
produite par Dieu en eux, et accompagnée d'une profonde Révérence. Elle dit que la Grâce de ce Divin Enfant imprimait
dans l'âme de tous ceux qui conversaient avec Lui un si admirable respect,
que jamais personne, ni grand ni petit, n'a osé prendre la liberté
de Le caresser comme on fait d'ordinaire pour les autres enfants ; que
cette Faveur a été réservée à la Sainte Vierge et à Saint Joseph ; que
tous les autres qui avaient le bonheur de Le voir, L'aimaient et L'admiraient
comme le plus beau et le plus parfait de tous les enfants des hommes, mais
qu'ils demeuraient en sa Présence dans un respect que nous ne pouvons
exprimer, parce qu'Il était mesuré à la disposition que Dieu mettait en son
peuple, auquel Il voulait alors tenir cachés les Mystères de son Fils. Dans
ses entretiens avec la Mère Élisabeth sur la Sainte Vierge, la Sœur
Marguerite dit que cette Vierge Sainte recevait une si grande Lumière sur la
Dignité de son Fils, qu'Elle Lui voilait quelquefois le Visage, n'osant, par
respect, Le regarder ; mais qu'Il lançait sur Elle et sur Saint Joseph
des rayons de Lumière par lesquels Il les remplissait d'Amour et les attirait
à contempler sa Beauté, dont la vue sanctifiait leurs âmes. La
Mère lui demanda si la Sainte Vierge n'avait point quelquefois parlé du Saint
Enfant Jésus à Saint Joseph, et si, réciproquement, Saint Joseph n'en avait
point parlé à la Sainte Vierge. Elle
répondit que non, et qu'il n'y avait point eu de discours tenus par manière
d'entretien entre ces deux Saintes Personnes ; qu'ils ne s'étaient
jamais parlé de la sorte ; qu'ils avaient dit en peu de mots les choses
nécessaires, et qu'il n'était sorti de leur bouche que les seules Paroles que
le Saint-Esprit leur avait fait dire ; que l'État de ces deux Saintes
Personnes avait été si admirable et si Divin, que l'entendement humain n'est
pas capable de le comprendre ; que nous ne le devons pas pénétrer selon
la faiblesse de nos pensées, parce que notre esprit est si rempli de bassesse
et si corrompu par le péché, qu'il ne saurait juger de l'État ni de la façon
de vivre de ces deux Saintes Personnes, soit à Nazareth, soit en Égypte, soit
en d'autres lieux ; que tout avait été rempli de Dieu en eux, et que,
quoiqu'ils fussent semblables à nous, la grâce les avait néanmoins élevés à
un degré éminent au-dessus de tous les autres hommes, et qu'elle avait
sanctifié toutes leurs actions, toutes leurs paroles et toutes leurs pensées. Elle
disait que la Sainte Vierge et Saint Joseph avaient peu parlé au Saint Enfant
Jésus, et que ce Divin Enfant avait peu parlé à la Sainte Vierge et à Saint
Joseph ; qu'Il leur avait dit seulement quelques Paroles de Charité, et
eux à Lui réciproquement, mais avec grand respect et révérence. Interrogée
si ce Divin Enfant ne leur avait point fait connaître dans ses entretiens les
Vérités qu'il devait révéler au monde, elle répondit que le Saint Enfant
Jésus avait été la Source de leur lumière et de leur intelligence, mais qu'Il
ne les avait point instruits par sa Parole, ni en son Enfance, ni en tout le
reste de sa Vie. ; qu'Il s'était toujours tenu auprès d'eux dans le respect
d'un enfant envers son père et sa mère, ce que l'Évangile exprime assez
lorsqu'il dit « qu'Il leur était
soumis » ;
que s'ils eussent dû recevoir l'instruction les uns des autres, le
Saint Enfant l'eût plutôt reçue de la Sainte Vierge, tant Il était humble,
que de la Lui donner par la Parole ; qu'Il était après d'eux comme la
lumière du soleil sur la terre ; qu’Il versait incessamment ses
influences sur leurs âmes, éclairait toujours leurs entendements, échauffait
leurs cœurs, était leur Voie pour aller au Père, et que, par ses Opérations
intérieures, Il leur découvrait la Vérité de ses Mystères ainsi que les
choses les plus hautes et les plus secrètes de Dieu. La
Mère lui demanda si jamais la Sainte Vierge était allée voir aucun de ses
parents ou de ses amis. Elle répondit qu'Elle n'en avait visité aucun autre
que Sainte Élisabeth, chez qui l'Esprit Saint L'avait conduite ; qu'Elle
n'avait eu amitié, ni communication avec personne ; que jamais Elle
n'avait fait un pas ni une action, ni dit un mot indifférents. Elle
dit à ce sujet que les âmes qui s'arrêtent aux bassesses de la terre, qui
recherchent d'être aimées des créatures, qui s'amusent à des bagatelles comme
les gens du siècle, qui désirent quelque chose de ce monde, qui ne cherchent
pas le Fils de Dieu en vérité, mais qui veulent mêler le monde avec Lui, sont
fort éloignées de Le posséder. « Ô, dit-elle,
ils ne Le trouveront pas. L'Enfant
Jésus veut être cherché tout seul, en simplicité d'esprit ; et cette
Divine Simplicité bannit de nos âmes ces folies et ces bassesses. Point
d'amusement, ni en nous-mêmes ni dans les créatures. Rien que Jésus cherché
et servi simplement et en vérité. » Elle
fit comprendre si clairement à la Mère Élisabeth combien la pratique
contraire était odieuse au Fils de Dieu et désagréable à la Sainte Vierge,
que la digne Prieure en conçut un désir plus ardent encore de s'avancer dans
la simplicité. La
Mère s'enquit si l'Enfant Jésus n'avait pas demandé à la Sainte Vierge les
choses dont Il avait besoin. La Sœur
Marguerite répondit que non ; qu'étant petit, Il avait pleuré et
crié quelquefois comme un autre enfant, s'étant revêtu en vérité de toutes
nos faiblesses, mais qu'Il n'avait rien demandé à la Sainte Vierge, parce
qu'Elle était tellement conduite par le Saint Esprit, qu'Elle subvenait à
tous les besoins du Divin Enfant autant que le Père Éternel le permettait, et
que son Fils le voulait d’Elle. Elle
ajouta que, comme le Saint Enfant Jésus n'a rien demandé à sa Sainte Mère et
s'est entièrement abandonné à sa conduite, qu'aussi Il n'a jamais rien
demandé à personne ;
qu'Il n'a pas mendié sa vie, le Père Éternel n'ayant pas désiré cela de Lui,
mais ayant pourvu à ses besoins et à ceux de la Sainte Vierge en les confiant
à Saint Joseph, à qui Il avait donné grâce pour trouver toujours matière de
s'employer en son métier de charpentier ; qu'en Égypte et à Nazareth, la
Divine Providence lui avait procuré assez d'ouvrage pour suffire à leur
entretien ; que les membres de la Sainte famille étant d'une complexion
fort robuste et la plus parfaite dont les enfants d'Adam aient jamais été
doués, ils se contentaient de peu, usaient d'une nourriture pauvre et
commune, et que leurs habits ne s'usaient pas plus que ceux des Israélites au
désert. Elle
disait que Saint Joseph allait quelquefois travailler à la journée, mais
qu'il n'entreprenait pas d'ouvrages susceptibles de détourner son esprit de
son application à Dieu ; que les Saints Anges l'aidaient quelquefois
dans ses travaux et l'accompagnaient partout par respect pour les dispositions
que le Saint Esprit avait mises dans son cœur. La
Mère Élisabeth lui demanda si Saint Joseph voyait les Anges. Elle répondit
avec une piété admirable qu'il les vit lorsqu'ils vinrent par milliers adorer
le Saint Enfant dans la Crèche, et qu'il vit Saint Gabriel en songe lorsque,
comme Messager de Dieu, il lui annonça sa Sainte Volonté ; mais qu'ayant
été choisi pour garder le Fils de Dieu, sa qualité de Gardien et de Père
Nourricier de Jésus l'élevait si haut au-dessus des Anges et ennoblissait ses
yeux d'une manière si sublime, qu'il ne fut pas occupé à voir les Anges,
quoiqu'ils fussent toujours auprès de lui, et que depuis qu'il eut le bonheur
de voir Jésus la première rois, ses yeux ne s'appliquèrent plus à dessein
qu’à Lui seul. La
Mère s'enquit si la Sainte Vierge se rendit à pied à Bethléem, si ce fut Elle
qui mena l'âne et le bœuf, si l'Étable et la Crèche furent ornées de quelques
lumières au moment de la Naissance du Saint Enfant Jésus. La réponse fut que
la Sainte Vierge avait fait le voyage à pied ; que l'Enfant qu'Elle
portait ne L'avait point incommodée ; qu'au contraire, Il L'avait rendue
plus agile ; que la Sainte Vierge n'avait rien en sa possession que la
petite Maison de Nazareth ; qu'Elle n'a eu ni bœuf, ni âne, ni aucune
autre chose ; qu'Elle ne fit provision, pour la Naissance de son Fils,
que des langes, des drapeaux et des bandelettes nécessaires pour
l'envelopper ; qu'au Moment de la Nativité, l'Étable fut remplie d'une
lumière qui surpasse nos sens, et que le bœuf et l'âne s'y trouvèrent par une
particulière Providence de Dieu. On lit
dans les mémoires laissés par les anciennes Carmélites de Beaune pour servir
à la composition de la Vie de la Mère Élisabeth, que le récit qui précède
n'est qu'un abrégé de ce que la digne Prieure avait écrit à la suite de ses
entretiens avec sa bienheureuse Fille. Elle a du reste avoué à plusieurs de
ses Sœurs que le mouvement intérieur qui la portait à faire ces questions
était, pour ainsi dire irrésistible : « Il faut bien, disait-elle, qu'il entre
dans les Desseins du Saint Enfant Jésus que la Sœur Marguerite communique les
Lumières qu'Il lui donne sur son Enfance, sur sa Vie Cachée en Égypte et à
Nazareth. Car ce que je lui demande ne vient point de moi-même, ni de l'envie
que j’aurais de savoir ces choses : je ne puis m’empêcher de
l'interroger, quoique j’en sois toute confuse. » La
science de la Sœur Marguerite sur toutes les circonstances relatives à la
Naissance du Fils de Dieu était pour ainsi dire, inépuisable. Elle
dit encore que les Saints Pasteurs adorèrent Jésus en sa vérité, qu'ils ne
vinrent qu'une seule fois dans l’Étable, qu'ils n’y demeurèrent que peu de
temps, et qu'aucun autre Juif n'y entra ; qu'aucune personne de la suite
des Rois ne s'y présenta ; que les Rois y entrèrent prosternés en terre
et firent leur offrande l'un après l’autre, sans dire aucune parole ;
que leur adoration se fit en esprit et en vérité ; que leurs présents
furent en quantité fort médiocre : un peu d'or, un peu d'encens et un
peu de myrrhe ; qu'ils n'offrirent ces présents que comme symbole des
hommages qu'ils étaient venus rendre au Sauveur Naissant ; qu'ils
baisèrent les Pieds du Saint Enfant dans ses langes, et qu'une grande Lumière
leur révéla sa Souveraine Puissance. Elle
dit en outre que les Saints Pasteurs n'apportèrent aucun présent, qu'ils
n'offrirent que leurs âmes, leurs cœurs et leurs volontés ; et que les
Saints Rois avaient reçu de Jésus Enfant la Grâce des huit Béatitudes. Voilà
les Lumières que cette sainte Fille avait puisées
dans l'oraison, en récompense de sa simplicité et de son innocence. La Mère
Élisabeth était digne de participer à ces Lumières, et ce ne fut pas la
moindre de ses gloires d'avoir été choisie de Dieu pour nous en transmettre
le bénéfice. |