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Entretiens de Marguerite du Saint Sacrement sur le voyage du Fils de Dieu en Egypte

Marguerite épouse de la crèche

 

Entretiens sur le voyage du Fils de Dieu en Egypte.

(Extrait du livre du Père Amelotte, édité en 1679)

 

 

 

 

 

Il n’est rien de pareil, ce me semble, aux lumières que cette âme admirable avait reçues sur le voyage du Description : C:\Users\Antoine\Desktop\Nouveau dossier (3)\fuite_egypte.gifFils de Dieu en Egypte. Elle dit que la Sainte Vierge n’eut connaissance qu’il fallût porter l’Enfant Jésus en Egypte, que par le témoignage de saint Joseph ; que ce fut à lui seul que le commandement en fut adressé, non que la sainte Vierge ignorât que son Fils devait faire ce voyage ; car elle savait ce que les Saintes Ecritures en avaient prédit, par ces termes, j’ai appelé mon Fils en Egypte, lesquelles elle entendait non seulement selon la lettre, mais encore selon tous les mystères cachés sous l’écorce des paroles. Mais elle n’en apprit le temps que par la bouche de Saint Joseph, ce qui fut une providence divine, afin qu’elle eût plus grande matière d’obéissance, de résignation et de sacrifice.

Elle dit que le Saint Enfant Jésus fut porté en Egypte peu de jours après la Purification de la Sainte Vierge, que le Saint Esprit les conduisit durant tout le voyage, comme il les avait conduits dans l’étable de Bethléem ; qu’ils demeurèrent en cette terre l’espace de sept ans. Ces sept premières années, dit-elle, ont été si dignes de Dieu, et ont rendu un honneur si particulier au Père Eternel, qu’il nous est impossible de le comprendre. Les anges adorent et révèrent ce bonheur et nous devons nous unir à eux pour adorer et pour aimer cet état, où le divin Enfant a été durant ces sept premières années qu’il a passées dans la terre d’Egypte.

Au moment que l’Ange avertit saint Joseph d’emporter l’Enfant Jésus en Egypte, toute la crainte qu’il avait d’Hérode, dont la tyrannie lui était fort connue, lui fut ôtée, et il reçut une assurance en son âme que l’Enfant Jésus serait en sureté en Egypte ; il marcha donc conduit par le Saint Esprit, et accompagné des saints Anges.

La sainte Vierge portait son Fils entre ses bras, et le regardant quelquefois avec un amour qui ne se peut expliquer, recevait de grandes lumières sur la fuite de ce Dieu Enfant. Elle entrait souvent en de hautes et amoureuses communications avec le Père Eternel, qui lui faisait comprendre les mystères de son Fils, et souvent avec les Anges, qui recevaient par elle des lumières sur l’Enfance de Jésus.

Elle dit que durant ce voyage le divin Enfant fut extrêmement travaillé du froid, et fatigué du chemin ; qu’il en pleurait quelquefois, et regardait sa sainte Mère, comme attendant d’elle quelque secours ; que la sainte Vierge qui l’aimait d’un amour de mère tendre et sensible, souffrait de grandes douleurs de le voir tant endurer, et que le mal de ce divin Enfant pénétrait l’âme de la sainte Vierge et de saint Joseph de telle sorte, que l’on ne saurait comprendre ce qu’ils souffrirent durant ce voyage.

Que le Père Eternel voulut conduire ces trois saintes personnes en cette terre, comme en un lieu de retraite et de solitude, afin de s’y glorifier en son Fils, et par son Fils, et de parler au cœur de la sainte Vierge et de saint Joseph. Aussi fut-ce en ce pays que la grandeur des mystères de l’Enfance fut clairement découverte.

L’Enfant Jésus, dit-elle, approchant de ce royaume, disposa divinement l’esprit des Egyptiens, et bien qu’il ne se fît pas connaître, sa puissance agit néanmoins sur eux, en telle sorte que la sainte Vierge et saint Joseph arrivant en Egypte, trouvèrent un accès facile auprès de ces Barbares, et il y eut des personnes qui les accommodèrent d’une petite maison, et qui leur donnèrent des choses nécessaires pour leur ménage. Ce peuple se sentit heureux de posséder cette sainte Famille ; il la regardait quelquefois avec admiration, selon qu’il plaisait à l’Enfant Jésus d’opérer en leurs âmes. Ils étaient étonnés de la conversation si sainte de saint Joseph et quelquefois le divin Enfant leur faisait voir un petit éclat de sa divine beauté et de sa douceur et il agissait sur leurs esprits par une certaine application de sa puissance, par laquelle il attirait ce peuple à l’aimer. Néanmoins il imprimait sur eux un si grand respect envers lui, et envers la sainte Vierge et saint Joseph, qu’aucun d’eux ne pût jamais prendre la liberté de traiter avec eux comme avec d’autres personnes, n’y n’osa jamais approcher de lui qu’avec crainte et avec révérence. Jamais aucun des Egyptiens ne l’a baisé ni tenu par la main, ni n’a pris auprès de lui ni sur lui aucune sorte de liberté, tant ils étaient portés au respect envers cet adorable Enfant, dont ils admiraient la beauté et la perfection, toutefois sans le connaître plus avant, car il ne se manifesta pas à eux, mais seulement il agit sur leurs cœurs par sa puissance, et les obligea à cette retenue.

Elle dit que cette humanité des Egyptiens ne leur était pas naturelle, qu’ils n’eussent pas reçu d’autres personnes étrangères, comme cette sainte Famille : mais que Dieu fit sur leurs cœurs un effet de sa divine puissance, et les disposa de telle sorte, que saint Joseph, et la sainte Vierge ne furent point obligés à mendier leur vie, encore qu’ils fussent très pauvres : chaque jour Dieu par sa providence faisait naître le moyen à saint Joseph de gagner par son travail ce qui était nécessaire pour entretenir sa sainte famille.

Elle dit que le temps de la sanctification des Egyptiens n’étant pas venu, ils ne reçurent point de grâce justifiante ; que l’Enfant Jésus ne se manifesta point à eux quoiqu’il agît puissamment sur leurs esprits pour les tenir en respect et en révérence ; que ce respect fut de telle nature qu’ils n’avaient point de parole en la présence du Fils de Dieu, de la sainte Vierge, et de saint Joseph. Qu’ils portaient un sentiment gravé dans leurs cœurs de la grandeur sacrée de cette sainte famille, qui les engageait secrètement à l’honorer et à l’aimer : mais qu’ils ne connaissaient ni le principe ni la nature de ce sentiment, et qu’il agissait dans l’âme de chaque particulier, sans qu’ils fussent capables d’en parler, ni de se le témoigner les uns aux autres. Elle dit que Dieu l’avait produit en eux en la manière dont il agit sur Caïphe, lorsqu’il prophétisa qu’il fallait qu’un homme mourût pour le peuple ; que la puissance de Dieu avait tenu sa langue, et l’avait fait parler, sans qu’il reçût aucun effet de grâce, ni qu’il en devînt plus vertueux : qu’ainsi Dieu avait excité et touché ce peuple sans qu’il en discernât l’effet, ni qu’il en fût rendu meilleur, étant demeuré dans son idolâtrie ; qu’il n’avait eu aucune part à la grâce du divin Enfant, quoiqu’il eût reçu l’impression de la souveraine Puissance, qui agit comme il lui plût sur lui et par lui.

Elle dit qu’encore que ces peuples fussent liés par le respect envers ses sacrées Personnes, en sorte qu’ils n’osaient les approcher ni les regarder, qu’avec une certaine crainte ; dont nous ne savons aucun exemple ; néanmoins lorsqu’ils étaient en affliction, de quelque nature qu’elle fût, ils ne voyaient jamais le divin Enfant, ni la sainte Vierge, ni saint Joseph sans ressentir une joie inexplicable dans leurs âmes, qui dissipait toutes leurs tristesses et toutes leurs peines.

Elle dit que jamais ces trois saintes Personnes n’eurent de communication familière avec ce peuple, que jamais le saint Enfant Jésus ne fit d’action puérile, qu’il ne se trouva jamais parmi les enfants des Egyptiens, mais qu’il se tint toujours auprès de la sainte Vierge et de saint Joseph, que les enfants même de ce pays le révéraient sans oser lui dire mot, ni se joindre à lui.

Elle dit que l’Enfant Jésus commença à marcher peu à peu, comme les autres enfants ; que ce fut le jour que sa sainte Mère le sevra, qui fut le jour de son incarnation vingt-cinquième de mars, quinze mois après sa naissance, et que par ses premiers pas il marcha vers la sainte Vierge et vers saint Joseph, ainsi que nous l’avons déjà marqué ailleurs.

Elle dit un jour ce qui suit : Le Saint Enfant Jésus a bien relevé les vertus durant son Enfance, car il a été de telle sorte dans l’innocence, qu’il ne s’est jamais abaissé aux puérilités des autres enfants : et jetant les yeux sur une image où le Fils de Dieu était représenté comme se recréant avec saint Jean : Mon petit Roi, dit-elle, votre innocence n’est pas là bien dépeinte, vous portez en vous la joie, la douceur et la bonté des petits enfants, mais vos mains divines n’ont pas fait cette action. Lorsqu’elle voyait des peintures où le Fils de Dieu était portrait, comme travaillant, soit de son métier de charpentier, ou balayant la maison, ou rendant quelque autre service à la sainte Vierge, et saint Joseph : Vous avez fait ces actions-là, disait-elle, et d’autres semblables pour nous montrer l’exemple, comme étant le plus humble de tous.

Elle dit que l’Enfant Jésus, la sainte Vierge et saint Joseph, sortirent d’Egypte en silence, comme ils y étaient venus, et que les Egyptiens se voyant privés de ces saintes et vénérables personnes, dont la présence leur avait apporté tant de joie et tant de consolation dans leurs peines, furent remplis d’une profonde tristesse ; que la divine puissance leur fit ressentir leur perte, sans leur laisser la liberté de témoigner leur douleur, et sans connaître davantage la dignité de cette sainte Famille.

Que le Saint Enfant Jésus entrant en Nazareth apporta une grande joie à toute la ville. Que les parents de la sainte Vierge en firent une réjouissance particulière, et que les enfants en furent tout émus, mais que cette joie n’était pas comme la nôtre, qu’elle fut produite de Dieu en eux, et accompagnée d’une profonde révérence.

Elle dit que la grâce de ce divin Enfant imprimait dans l’âme de tous ceux qui conversaient avec lui, un si admirable respect, que jamais personne ni grand ni petit n’a osé prendre la liberté de le caresser, comme l’ont fait d’ordinaire les enfants ; que cette faveur a été réservée à la sainte Vierge et à saint Joseph ; que tous les autres qui avaient le bonheur de le voir, l’aimaient et l’admiraient comme le plus beau et le plus parfait de tous les enfants des hommes, mais qu’ils demeuraient en sa présence dans un respect, que nous ne pouvons exprimer, parce qu’il était mesuré à la disposition que Dieu mettait en son peuple, auquel il voulait alors tenir les mystères de son Fils caché.

 

 

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